Né sur le Rocher en 1914, fier de sa nationalité monégasque qu’il tient de ses ancêtres, Georges Franzi a très tôt la vocation et proclame à 3ans qu’il veut devenir Pape. C’est finalement pour être missionnaire qu’il va rejoindre Allex, dans la Drôme, le séminaire des Pères du Saint – Esprit. Atteint de tuberculose, il doit interrompre ses études et part en Suisse se faire soigner. A son retour, c’est au grand séminaire de Nice qu’il se prépare à son sacerdoce et qu’il est ordonné prêtre en 1940. Ses premières paroisses sont celles de l’arrière-pays niçois (Clans, Rigaud) puis Notre-Dame de Lourdes et St Roch à Nice.
Bien ancré dans son sol natal, il sait l’importance de la langue maternelle, la première que l’on entend au berceau, celle qui permet d’exprimer des sentiments profonds, la langue identitaire. Il apprend alors le parler de ses ouailles pour mieux les comprendre et créer un climat de confiance et de familiarité.
Il mène son action au service de sa foi en étant aumônier des Scouts, de la Prison et de nombreuses associations.
Dès son retour à Monaco, il constate un affaiblissement dans l’usage du parler de ses aïeux, l’âme de la Nation. Il participe alors activement à l’œuvre entreprise par Louis Notari, Louis Canis, Lazare Sauvaigo, Louis Frolla, Robert Boisson et Louis Barral au sein du Comité National des Traditions Monégasques pour la sauvegarde de la langue et des traditions. Il devient artisan de la reconquête et de la réhabilitation de la langue ancestrale par ses prêches, homélies, prières, poésies et ses fameusesCiaciarrade en monégasque et œuvre pour que le Monégasque soit enseigné aux enfants dans les écoles afin che ren nun se perde
Le Prince Rainier III déclarait à la séance inaugurale de l’Académie des Langues Dialectales : « Laisser mourir une langue, c’est ternir à jamais l’âme profonde d’un peuple, c’est renoncer pour toujours à l’un des legs les plus précieux de son passé » et décidait en 1976 que l’enseignement du Monégasque serait obligatoire dans les écoles primaires de la Principauté. Le chanoine Franzi est alors chargé de cet enseignement.
Il fut donc le premier enseignant de Monégasque et travailla sans relâche à mettre au point « U me primu libru » et « A piciuna gramatica », les premiers manuels scolaires en langue monégasque. Qui ne se souvient de notre cher Canonicu, la voiture garée toujours à la diable, pleine de tirages à l’usage d’i fiyœi , courant entre deux messes per i morti, per i pastri ün pruvença o ‘na reüniun a u Cumitau ?
Entouré d’une petite équipe d’enseignants spécialisés, nommés par le gouvernement princier, il vit le couronnement de son travail en 1987 lorsque le Monégasque devint option au baccalauréat. Aujourd’hui, Il serait heureux et satisfait de constater que son œuvre de maintenance de la langue s’est poursuivie et renforcée avec la mention obligatoire de l’apprentissage, les deux premières années du collège.
Cet ardent défenseur de la langue sera Vice-Président de la Commission pour la langue Monégasque, Vice-Président de l’Académie des Langues Dialectales et Président du Comité National des Traditions Monégasques.
Parcours peu ordinaire pour un prêtre peu ordinaire, et, s’il était fier du titre que lui avait donné l’Eglise, « Monseigneur », il l’était encore plus de celui donné par les enfants, « Maistru ».
Il nous a quittés le 13 janvier 1997.
Dominique Salvo
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